mardi 4 octobre 2011

Fools


Cette année, c'était l'Afrique du Sud qui était l'honneur au festival du cinéma de Douarnenez. On en profite d'ailleurs pour saluer le boulot original, accueillant et fort en gueule proposé chaque année en Finistère sud.
Une sélection de documentaires et fictions, souvent peu connus ou peu diffusés, invite à la découverte du pays.
Fools
révèle une Afrique du Sud post apartheid bafouée et désunie au travers la vie du professeur Zamani. Ce dernier mène une vie de regret dans les bras de l'alcool et des prostitués. Sans illusion, il enseigne dans un collège acquis aux thèses anglaises pro-aparthied réécrivant l'histoire du pays. Ayant abusé de l'une de ses élèves, son dégout de lui-même n'en est que plus grand. Sa rencontre avec Zani, frère de cette élève et activiste anti-aparthied naïf, engendre une laborieuse quête de rédemption.

Fools de Radaman Suleman avec Patrick Shai, Dambisa Kente et Hlomla Dandala - 1997.

Le premier tier du film est confus. D'emblée plongé dans le quotidien, on suit les protagonistes sans comprendre. La relative lenteur n'aide pas à décoincer la dynamique. Les relations entre les protagonistes et la trame générale ne s'éclairent que vers la moitié du film. Le choix "témoignage du quotidien sans explication" n'est pas mauvais en soi mais couplé à la réalisation sobre et lente, l'esprit du spectateur s'égare et son oeil papillonne.
Une fois ce confus début digéré et la trame assimilée, le propos devient intéressant, grinçant et juste. Le réalisateur Ramadan Suleman présente une Afrique du Sud humiliée (s'apprêtant à fêter leur propre massacre pour la gloire des anglais), divisée (autant par les déchirures publiques -aparthied- que privée -viol-) et blasée (soumission des personnages à la situation).
Humanité rampante et brisée que fustige le réalisateur dès le titre. "Fools! Abrutis! Voyez ce que l'apartheid a fait de vous!" Ramadan accuse presque moins les blancs que le complexe d'humiliation figé des sud-africains. Radaman a d'ailleurs l'intelligence de ne montrer les blancs tyranniques qu'avec une grande parcimonie. Le déséquilibre, blancs en minorité mais au pouvoir n'en est que plus flagrant.

C'est le jeune Zani ayant fait ses études à l'étranger qui vient perturber l'immobilisme. Son engagement contre l'apartheid, quasi-suicidaire, réveille peu à peu la conscience de Zamani. La culpabilité maladive du professeur le conduit finalement à soutenir Zani. La réunion de ces deux personnages qui n'ont pourtant pas lieu d'être proches, apparait comme une petite note d'espoir. Pas d'héroïsme ici, juste la sobriété pesante du quotidien et des caractères aux motivations diverses. Une tranche de vie réquisitoire et allégorique de la situation en Afrique du sud.