mardi 15 novembre 2011

Molière

Ne craignez pas la biographie congelée et austère, plongez avec délice dans ce réjouissant spectacle! Un hommage brillant, drôle et inventif à l'incontournable figure du théâtre français réalisé par Laurent Tirard. Même si il ne vous reste comme moi que de brumeux souvenirs des pièces apprises sous la baguette à l'école, vous appréciez. Et je gage qu'un connaisseur en la matière prendra littéralement son pied.


Avant de devenir Molière, Jean-Baptiste Poquelin est un dramaturge tragique inconnu poursuivit par des créanciers. Sa rencontre avec Monsieur Jourdain le propulse dans un univers loufoque où se mêlent les futures intrigues de ses pièces.

Molière de Laurent Tirard (Le petit Nicolas, Gasp!) avec Romain Duris, Fabrice Luchini, Laura Morante, Edouard Baer et Ludivine sagnier - 2006.

Laurent Tirard excelle ici à l'écriture comme à la réalisation pour créer des ponts entre théâtre et cinéma. Il ne manquait plus que des acteurs talentueux pour finaliser l'oeuvre. On tient là les trois clefs de cette réussite: un scénario engageant et subtil, une mise en scène ingénieuse et des acteurs captivants.

Le scénario rend un bel hommage à l'esprit de Molière. Parti pris audacieux que d'inventer à Molière cette aventure censée lui inspirer ses futures créations. De véridiques zones d'ombres dans la biographie du dramaturge justifient même cette farce. La rencontre inédite des grandes figures de Molière (le bourgeois gentilhomme, Tartuffe, les précieuses...) est cohérente et jubilatoire. Les dialogues classiques et ceux de Tirard s'enchevêtrent à la perfection. La prose est pétillante, pleine d'humour et d'esprit. Les doubles jeux de parole propre à Molière fonctionnent aussi à merveille. Point de comique usurpé. L'histoire est dynamique, bien rythmée par les rebondissements théâtrals jusqu'au Deus Ex Machina final.


La mise en scène lance également des échos constants au théâtre. Notamment en jouant avec l'espace scénique. Les entrées et les sorties de "scène" sont joyeusement mises en valeur. Molière bondissant au ralenti par la fenêtre, Madame Jourdain trébuchant en sortant, monsieur Jourdain égaré brièvement dans le jardin... Les apartés du théâtre sont habilement reprises par des scènes en arrière plan: Chute de cheval de monsieur Jourdain vue par la fenêtre, baiser de la fille dans l’embrasure de la porte...


D'excellents acteurs complètent la partition; lui donnant corps et voix. Ils incarnent tous brillamment les caractère crée par Molière. Au premier plan Luchini, magnifique monsieur Jourdain, benêt crédule dont tous abusent. Une performance géniale, il se passe même de la parole mais reste hilarant (un défi pour un bavard tel que lui). Romain Duris est brillant, composant un Molière rusé à la frontière du prétentieux. Laura Morante est la vraie beauté, vive et généreuse. Et Ludivine Sagnier une peste de précieuse courtisée par l'opportuniste Edouard Baer. Tous vêtus de si biaux costumes. Gasp, je suis touchu!

Ce défi de faire revivre Molière, le réalisateur le relève haut la main. Ni trahison, ni plagiat, c'est une reprise intelligente en forme de fausse biographie-vrai hommage.

dimanche 13 novembre 2011

Le Chardon et le Tartan

Pour la première critique littéraire, voici le premier tome de la série à succès (Outlander) de Diana Gabaldon. Best-seller dont les aficionados, souvent des femmes, vouent un véritable culte à l'un des personnages, le flamboyant Jamie Fraser. Sur une trame de romance historique, Gabaldon convoque avec une inégale justesse plusieurs fantasmes (le principal étant le personnage de Jamie). Atmosphère propice à l'évasion et aux rêves, tantôt réussie, tantôt franchement exagérée.

1945, fin de la seconde guerre, en Ecosse, la jeune et belle Claire, heureuse et fraichement mariée, profite de son voyage de noce. Propulsée au hasard d'un étrange cercle de pierres en 1743, Claire plonge dans une Ecosse sauvage et brutale, couvant une rébellion contre les anglais. Elle devra compter sur sa débrouillardise et sur le fougueux Jamie pour affronter la méfiance des autochtones à son sujet. Les charmes du jeune écossais attirant irrésistiblement Claire...

Le jeu de l'auteur est avant tout de construire un double fantasme, historique et amoureux. Elle y parvient inégalement, l'amour pour son personnage parasitant ses qualités d'auteur (du point de vue masculin).
  • Fantasme historique: Gabaldon met en scène le vieux rêve du retour dans le temps, impliquant l'inévitable rencontre avec l'ancêtre de ses proches, la conséquence des actions sur le futur et la confrontation des modes de vie. Dimension surréaliste qui dote le récit d'un intérêt que la romance n'aurait suffit à créer elle-seule (du point de vue masculin).
  • Fantasme amoureux: Avec Jamie et Claire, l'auteur invente un couple mythique de héros fantasmés, idéalement parfaits, totalement dévoués l'un à l'autre. Individuellement déjà géniaux, leur union anoblit encore leurs perfections. Claire est une belle infirmière, adorable et curieuse, aventurière et débrouillarde. Ses connaissances des plantes médicinales et son intérêt pour le sexe achèvent de brosser ce séduisant portrait. A l'opposé du charisme discret de Claire, celui de Jamie est écrasant et universel. On perçoit sans mal le désir de l'auteur pour son personnage. Dans sa quête enflammée de concevoir cette idole masculine, Gabaldon en fait des tonnes (du point de vue masculin). Je m’abstiendrais par pudeur de lister les innombrables qualités et talents de Jamie Fraser. Ses soi-disants défauts (n'étant en fait que des sous qualités) servent aux admiratrices rêveuses pour justifier la perfection du personnage. Mais la présence d'un oeil masculin est ici déplacé. Ce qui lui semblent être qu'une grosse tarte à la crème romantique est finalement un pari réussi, à en juger par la frénésie internet générée par Jamie. Le jeu le plus répandu étant de trouver un visage à Jamie parmi des acteurs. Il devient sous la plume concupiscente de Gabaldon une marionnette qui sert les envies de l'auteur.

Le style de Gabaldon est souvent simple et direct, la lecture est légère. On pourrait relever certains procédés stylistiques redondants (ironie répétitive de Claire). Son écriture manque parfois de subtilité quand elle aborde les deux rails de son récit, l'histoire et la romance.

L'auteur approche le genre historique avec souplesse. Elle dresse une toile de fond cohérente sans passer par de lourds encarts pédagogiques pour expliquer la situation. Au lecteur de s'interroger sur les causes de la présence anglaise et autres. On découvre en surface une Ecosse fière et rude, quelquefois un peu stéréotypé. Les jeux politiques parmi un clan sont bien menés. La rébellion jacobite, incontournable pour les contemporains se penchant sur cette époque, est subtilement évoquée. Les allusions sont peu nombreuses, intelligente touche de réalisme car la majorité des écossais n'était que partiellement concernée. Un bémol avec la déconcertante facilité d'adaptation de Claire à sa nouvelle vie. Même si Gabaldon eut la sagesse de déplacer Claire des rigueurs de la guerre aux rigueurs de l'ancienne Ecosse, on peine à imaginer cet autre monde. Mais ce n'est pas le propos principal.

L'enjeu du récit, c'est bien sur la romance entre Jamie et Claire. Plus qu'un rail, c'est une véritable locomotive narrative qui pèse souvent trop sur l'histoire. Toute l'intrigue est conçue pour rapprocher inexorablement les deux personnages. Certains tournants narratifs devenant vraiment exagérés (l'union forcée de Jamie et Claire). Ce couple modèle de l'amour-passion, soupoudré quotidiennement de sexe brulant, déborde de sensibilité. L'emphase domine leurs rapports et l'auteur s'y adonne avec plaisir. Au mieux amusant, au pire pesant.

Une lecture agréable mais qui fera fréquemment tiquer le lecteur mâle. La surenchère est évidemment différemment perçu selon les personnes. Indubitablement écrit par et pour le beau sexe. Saint Jamie, bandez pour nous!

lundi 7 novembre 2011

Devdas

Vous connaissez ces oeuvres dont les titres vous courent les oreilles depuis des années? Ces films que tous vos proches ont appréciés. Ces chefs-d’œuvre que vous oubliez quotidiennement de télécharger. Ces créations devant lesquelles les critiquent éjaculent de joie à l'unisson. Un jour, miracle, on vous propose l'objet en question. Mais le danger est grand tant l'apriori est positif.
Devdas est de ces films. Acclamé partout! Pourtant accablant. Dès les premières scènes, la médiocrité vous saute à la gorge et ne vous lâche qu'après trois heures, vous laissant blême, à demi macchabée.
Paro brandissant fièrement la flamme de la connerie

Paro (Aishwarya Rai) et Devdas (Shahrukh Khan) furent amis enfants. Envoyé 10 ans à londres à cause de son père, Devdas est de retour. Les deux débordent encore d'amour l'un pour l'autre mais les différences sociales entre leurs familles vont ruiner leur union.

Devdas de Sanjay Leela Bhansali (Black) avec Aishwarya Rai et Shahrukh Khan - 2002.

Ce classique de la littérature indienne, pendant de Roméo et Juliette a déjà connu plusieurs adaptations, dont celle-ci commise par Bollywood. Unanimement reconnue au grand désarroi du chroniqueur probablement insensible. La déception est à la hauteur des mirifiques critiques. On ne peut que s'étonner d'un tel consensus autour du film (le même actuellement pour The Artist). A croire que le monde des critiques est une seule et même bête (parfois très bête). La déconvenue est aggravée par ces fallacieuses critiques face à la nullité de l'ensemble et l'abominable longueur (3h dont la moitié absolument vide d’intérêt ). La performance de Shahrukh Khan et quelques chorégraphies correctes ne permettent pas d'épargner le naufrage. La pauvreté de l’œuvre fait un écho amusant au luxe outrancier de la mise en scène. Le scénario éculé, les dialogues creux et le sur-jeu des acteurs amusent un premier temps (l'impression de voir des comédiens sous acide), lassent rapidement, puis énervent, et lassent à nouveau.

Devdas tentant vainement de se cacher dans ce fastueux gâchis

Théatralisation et histoire classique pourraient composer un style particulier, propre à la fable ou au conte pour traiter de thématiques universelles. C'est l'opposé, au plus mauvais sens du terme. Le scénario est un cliché usé de l'amour absolu, les acteurs sont pompeux et pénibles. La mise en scène, grossière, se cache derrière la débauche de richesse constamment vomie à l'écran. Lumières étincelantes, bijoux éclatants, luxe aveuglant parasitent l'image (maux de tête à prévoir). Chaque vison d'un lustre s'accompagne d'un ridicule tintement scintillant.

Peut-être que le défi du réalisateur fut de briller sur tous les niveaux de la caricature. Le bougre y parvient avec brio. Emotions et sentiments sont allégrement noyés sous les décors grandiloquents, les personnages pompeux et la réalisation (se voulant grandiose, grotesque en vérité). Le dernier traquenard du réalisateur, c'est la longueur. L'ennui s'installe. Il ne reste plus qu'à se laisser hypnotiser par les lumières et les interminables chorégraphies. Pas si déplaisant une fois engourdi, juste très long. Un visionnage laborieux mais complet pour légitimer cette critique.

mardi 1 novembre 2011

La leçon de piano

S'arrêter à Bright Star pour connaitre la réalisatrice Jane Campion aurait été une vilaine erreur. Car elle a déjà commis bien meilleur oeuvre que cette tristement classique histoire d'amour. A savoir, son film succès, palme d'or 1993, La leçon de piano. A la fois poétique et engageant, rêveur et juste, le film esquisse en finesse l'étrangeté des comportements et des relations humaines.


Milieu dix-neuvième, Ada mère muette, est envoyée rejoindre son nouveau mari en colonies anglaises, accompagnée de sa petite fille Flora, de son piano et de son grand besoin d'y jouer. Les circonstances l’emmènent à échanger ses moments au piano contre les désirs d'un associé de son mari.

The piano par Jane Campion avec Holly Hunter, Harvey Keitel, Anna Paquin et Sam Neill - 1993.

On est d'emblée captivé par l'atmosphère du film, la déconcertante arrivée en Nouvelle-Zélande, cette femme au blanc visage qui ne parle pas, les vagues puissantes et le piano sur la plage. Cette impression de rêve se dissipe un peu par la suite mais revient parfois par intermittence jusqu'à la séquence finale. La trame est classique mais efficace, la réalisation et les acteurs excellents.
On suit le surprenant duo composé de la petite fille enjouée et de sa mère, digne et silencieuse évoluant au milieu de la jungle. L'actrice Holly Hunter délivre un jeu magnifique, visage fermé mais débordant de force, corps vif et expressif. Mutique, elle confère à Ada une grâce véritable, un détachement et une volonté mystérieuse. Performance nécessaire au film dont l’intérêt et l'intrigue se jouent sur ce silence.
Les trois autres acteurs principaux, bien que moins fascinants, campent néanmoins très bien leurs personnages. En particulier la petite fille, Anna Paquin (futur Malicia des X-men), esprit affuté mais capricieux, criante de gaité et de réalisme. Harvey Keitel sobre, à la tendresse de bois brut. Et Sam Neill qui promène son hésitation, sa maladresse et son inoubliable face d'Alan Grant en tant que mari absent. Dès les premières scènes, on pourrait presque lire sur son visage qu'il va sera le couillon de l'affaire. Tragique couillon du quotidien.

La dimension poétique du film est portée par Ada. C'est son étrange présence et son impénétrable caractère qui troublent, perturbent et entraînent l'histoire, un pied dans le réel, un autre dans le rêve. Son silence créé un écho dans chaque scène, tisse des correspondances entre ses ressentis intérieurs et son environnement. La nature(vagues, pluie, jungle) et la musique témoignent de ses sentiments à la place de sa voix. C'est ce monde secret qui se cache dans les non-dits, pas seulement ceux de Ada, qui intéresse Jane Campion. La réalisatrice capture subtilement la complexité de cet univers invisible que sont les émotions. C'est bien là l'essence même de la poésie, d'accéder à une beauté cachée, insaisissable dans la réalité. Ici la beauté cachée ce sont les émotions, cernées mais toujours voilées par Jane Campion. Elle parvient à transcrire l'émotion tout en conservant son intrinsèque mystère (Peut-on vraiment comprendre l'émotion d'autrui?).

La réalisatrice ne présente pas une poésie cryptée et inaccessible, au contraire, son langage est accessible et instinctif. Les correspondances et l'étrangeté tracent un sentier poétique accueillant.
La nature, la musique et l'image traduisent l'état des personnages, évidemment surtout pour Ada. Le remous intérieur lors de l'arrivée au nouveau monde (les vagues), l'abandon du piano, le désir de Baines pour Ada quand elle joue... Au surprenant récit de Flora sur la disparition de son père se greffe une animation surréaliste de se dernier 'embrasant. L’ouïe et la vue sont toujours convoquées en duo.
La singularité des personnages, du lieu et des situations confère au film une légère ambiance de rêve. les robes victoriennes en pleine jungle, la mère muette et la fille à la vive repartie, l'air de piano revenant sans cesse. Lors de sa dernière apparition, le mari Allistair déclare qu'il est entré dans un rêve. Il choisira d'y mettre fin, à la discrétion de la réalisatrice, mais on peut imaginer le pire. Le titre même est un voile poétique. Ce n'est pas la leçon de piano qui importe mais bien le rapport entre les être qu'induit cette leçon.

Poésie ne rime pas forcement avec irréalisme. C'est même l'inverse ici. C'est bien grâce à cette réalisation poétique que les comportements des personnages gagnent en profondeur. Le marché de Baines (des touches contre une touche), la colère d'une enfant, la violence de la déception d'Allistair. Mais cela vaut tout spécialement pour Ada. Ses sentiments restent teintés de mystère. Qu'a t-elle réellement pensé du marché de Baines? Accepte t-elle ce marché par besoin ou par gout? Comment est-elle soudainement tombée amoureuse de Baines? Quel est le sens des caresses pour son mari? Comment a t-elle vécu la vengeance de ce ce dernier? Quel est le sens de son geste suicidaire final? Si des pistes sont lancées par la réalisatrice, celle-ci préfère rester en retrait et laisser incertaines les émotions de Ada. Les indices tissés par les jeux de correspondance n'étant qu'approximatifs. L'intelligence de Jane Campion est de ne pas cerner les sentiments de ses personnages mais de leur laisser leur énigmatique beauté.


L'histoire est classique mais brille par une mise en scène sensible et poétique. Les émotions, thème central, sont ébauchées à la perfection et quasi-personnifiées par Ada. Celle-ci rayonne d'une insondable grâce, portée par l'excellente performance d'Holly Hunter. Jane Campion arrive sans faute à traduire les émotions sans les figer. Une vraie réussite!

mardi 4 octobre 2011

Fools


Cette année, c'était l'Afrique du Sud qui était l'honneur au festival du cinéma de Douarnenez. On en profite d'ailleurs pour saluer le boulot original, accueillant et fort en gueule proposé chaque année en Finistère sud.
Une sélection de documentaires et fictions, souvent peu connus ou peu diffusés, invite à la découverte du pays.
Fools
révèle une Afrique du Sud post apartheid bafouée et désunie au travers la vie du professeur Zamani. Ce dernier mène une vie de regret dans les bras de l'alcool et des prostitués. Sans illusion, il enseigne dans un collège acquis aux thèses anglaises pro-aparthied réécrivant l'histoire du pays. Ayant abusé de l'une de ses élèves, son dégout de lui-même n'en est que plus grand. Sa rencontre avec Zani, frère de cette élève et activiste anti-aparthied naïf, engendre une laborieuse quête de rédemption.

Fools de Radaman Suleman avec Patrick Shai, Dambisa Kente et Hlomla Dandala - 1997.

Le premier tier du film est confus. D'emblée plongé dans le quotidien, on suit les protagonistes sans comprendre. La relative lenteur n'aide pas à décoincer la dynamique. Les relations entre les protagonistes et la trame générale ne s'éclairent que vers la moitié du film. Le choix "témoignage du quotidien sans explication" n'est pas mauvais en soi mais couplé à la réalisation sobre et lente, l'esprit du spectateur s'égare et son oeil papillonne.
Une fois ce confus début digéré et la trame assimilée, le propos devient intéressant, grinçant et juste. Le réalisateur Ramadan Suleman présente une Afrique du Sud humiliée (s'apprêtant à fêter leur propre massacre pour la gloire des anglais), divisée (autant par les déchirures publiques -aparthied- que privée -viol-) et blasée (soumission des personnages à la situation).
Humanité rampante et brisée que fustige le réalisateur dès le titre. "Fools! Abrutis! Voyez ce que l'apartheid a fait de vous!" Ramadan accuse presque moins les blancs que le complexe d'humiliation figé des sud-africains. Radaman a d'ailleurs l'intelligence de ne montrer les blancs tyranniques qu'avec une grande parcimonie. Le déséquilibre, blancs en minorité mais au pouvoir n'en est que plus flagrant.

C'est le jeune Zani ayant fait ses études à l'étranger qui vient perturber l'immobilisme. Son engagement contre l'apartheid, quasi-suicidaire, réveille peu à peu la conscience de Zamani. La culpabilité maladive du professeur le conduit finalement à soutenir Zani. La réunion de ces deux personnages qui n'ont pourtant pas lieu d'être proches, apparait comme une petite note d'espoir. Pas d'héroïsme ici, juste la sobriété pesante du quotidien et des caractères aux motivations diverses. Une tranche de vie réquisitoire et allégorique de la situation en Afrique du sud.

lundi 29 août 2011

Passé virtuel

"La vérité est ailleurs." Voici un spectacle que l'agent Mulder ne rechignerait pas à regarder entre deux cavalcades ésotériques. Deux similitudes entre la série à succès X-Files et ce film de science-fiction : enquête au dela du réel et facture cheap.
Douglas Hall est lin des concepteurs d'un jeu vidéo ultra-réaliste se déroulant à Los Angeles dans les années vingts. Quand l'un de ses collègues est assassiné, les soupçons pèsent sur lui. Douglas plonge alors dans le jeu virtuel pour éclaircir l'affaire et sauver sa peau.

The thirteenth floor de Josef Rusnak avec Craig Bierko, Armin Muller-Stahl et Gretchen Mol - 1999.

Début de scénario tarte, ultra-classique, meurtre puis soupçons (hachement original). Malgré l'absence certaine d'un bon jeu d'acteur et de dialogues subtils, on se laisse docilement porté par l'investigation pourtant brouillonne des protagonistes. Certes la réalisation (par Josef Rusnak) est simpliste mais ne boudons pas notre plaisir, les amateurs de réalité virtuel apprécieront. Devançant de peu Matrix en l'année 1999, cette production s'inscrit dans la veine des films aux mondes factices. Les années 90 en offrent une grouillante portée; Total Recall, Dark City, L'armée des douze singes, eXistenZ, The Truman Show... pour culminer avec le fameux Matrix. Christopher Nolan, discutant de son film Inception, évoque Passé virtuel et Dark City comme influences.
L'intérêt de ces productions c'est de présenter une histoire logique dans un monde qui le l'est pas. Le principe repose souvent sur une technologie créant un monde virtuel. La narration joue donc de ces aller-retours confondants entre réalité et fiction. Le but est de créer un vertige chez le spectateur qui s'égare entre le faux et le vrai, de le perturber par une folie logique. Le visionnage entraîne des discussions abstraites, cherchant à démonter ou démontrer la logique du film. Ici même si cette dernière manque parfois de cohérence, elle s'avère plutôt bien reglée.
On passe au final un assez bon moment avec Passé virtuel. L'effet de surprise est rouillé et le film a plutôt mal vieillit. On le déguste comme un téléfilm avec une 'tite discussion à la fin pour dénicher les incohérences.

Incohérences (et spoilers) :
  • Au début, Fuller donne sa lettre pour Douglas au barman. Celui-ci l'ouvre immédiatement sans raison. Acte mécanique inexpliqué qui sert les besoins du scénario. On peut toujours argumenter que c'est un barman louche.
  • L'enquête policière est bien légère car malgré les gros soupçons qui pèsent sur Douglas, pas de perquisition et d'écoute de son répondeur. Pourtant l'inspecteur sait que Fuller a appelé Douglas le soir de sa mort.
  • Le jeu a un défaut énorme, celui d'échanger les consciences d'un personnage virtuel et d'un joueur si celui-ci vient à mourir. Autant le défaut est compréhensible dans le projet de jeu inachevé de Douglas et Fuller, autant cette erreur est impossible dans une société (celle de la fin) où ces jeux virtuels sont répandus à grande échelle

mercredi 24 août 2011

Sommaire


  • Rhââ Lovely ! : Orgasmes à répétition du chro-niqueur. J'exagère, je ne me donne pleinement que devant une photo de Margaret Tchatcher. On atteint ici le sans faute.
  • A croquer sans tarder : Du bon et du très bon, de l'oeuvre réussi à l'indispensable.
  • Trésors cachés : Des œuvres méconnues à découvrir
  • To infinity and beyond : Qui suis-je? Ou vais-je? Quel est l'age de la capitaine et ses mensurations? œuvre qui questionne et taraude nos esprits embrumés par la matrice et les discours fumeux de l'Architecte (comprend qui peut). Hum par corolaire...
  • Que d'un œil : Une oeuvre plaisante avec de l'idée mais intérêt mitigé dont on peut se passer.
  • Pet d'ascenseur : Plaisir honteux mais jouissif.
  • Part d'Histoire : Oeuvre qui lorgne, introduit voire discute de l'Histoire. Biographie incluses.
  • Décontracté du gland : Prise de tête nul, originalité inexistante, autoroute du divertissement. Nanars marrants, rouleaux compresseurs d'Hollywood... Le repos du guerrier après Mulholland Drive.
  • Ca ne me fait ni chaud ni froid : Aussitôt vu aussitôt oublié, passez le message et votre chemin.
  • La guimauve ça dégouline : Oh je t'aime mais notre amour est impossible. Rodrigue as-tu du coeur? Amour toujours mais amour trop lourd.
  • Slips et capes : Les super-héros. Le pêché mignon du chroniqueur qui se pare volontier en puissant Thor pour pianoter le clavier à petit de Mjolnir.
  • Trahiture! : Oh mais il a cinq pattes ce canard! Trompé sur la marchandise, on s'attendait à un truc et on finit avec un machin.
  • Je me abricot : Un gars monte dans un noyer et crie "Au secours je me noix!". Alors un type monte dans un abricot et crie "Au secours je me abricot!". Idem pour moi dans certaines œuvre je n'y comprends rien, je m'y abricot et ne vois pas où le réalisateur veut en venir.